1-1-e1669908198824-png
40392330_wm-2340160-2694608-jpg

Le président du TC met en garde contre les « tentatives de pression sur les tribunaux pour qu’ils décident d’une certaine manière »

Dans un discours prononcé à la séance d’ouverture de la conférence internationale commémorant le 40e anniversaire de la Cour constitutionnelle, João Caupers a souligné que, ces derniers temps, il y a eu « une intensification de l’exposition des juridictions constitutionnelles à l’opinion publique ».

Caupers a déclaré que « les affaires les plus pertinentes pendantes devant les tribunaux portugais, y compris la Cour constitutionnelle, sont abondamment commentées, dans les médias et sur les réseaux sociaux, avant même qu’elles ne soient connues », mais sans signaler des situations concrètes.

Pour le président de la Cour constitutionnelle, ces propos sont tenus « par ceux qui, n’ayant que peu ou pas connaissance des enjeux – souvent très délicats -, ne s’abstiennent pas de rendre des jugements hâtifs et mal fondés ».

« Si parfois l’ignorance est compréhensible et demande un effort plus intense de la part des tribunaux pour mieux expliquer leurs mécanismes de prise de décision, à d’autres moments elle déguise mal les tentatives de pression sur les tribunaux pour qu’ils décident d’une certaine manière », a-t-il averti.

João Caupers a estimé qu' »il ne semble pas possible d’inverser cette situation, il faudra donc réfléchir à la meilleure façon d’y faire face, sans affecter la réserve de l’activité judiciaire et la tranquillité indispensable à la considération judiciaire ».

Cette mise en garde de João Caupers a été faite dans un discours dans lequel il a indiqué que « de nombreux changements » ont lieu dans le monde de la justice constitutionnelle et dans lequel il a évoqué la question des métadonnées.

Parmi les différents changements qu’il a relevés, le président de la Cour constitutionnelle a spécifiquement abordé le problème de « l’équilibre entre les valeurs de liberté et de sécurité », estimant qu’après que l’implantation de la démocratie eut transformé la « défense des libertés » en le « plus précieux », on assiste aujourd’hui à une évolution de cette « hiérarchie des valeurs ».

João Caupers a souligné que « les transformations que le monde a connues ces dernières années », notamment dues à « des phénomènes tels que la mondialisation et le terrorisme », ont accentué « les impulsions sécuritaires ».

« La valeur de la sécurité prenait du poids, la peur – intensifiée en raison de l’impact de la pandémie de covid-19 – accentuait les impulsions sécuritaires, augmentant les restrictions aux libertés jusqu’à récemment considérées comme inacceptables et désormais considérées comme inévitables », a-t-il souligné.

Selon le président de la Cour constitutionnelle, « ce n’est pas seulement le souci de sécurité, au sens le plus strict du terme, qui a mis en péril la liberté : il s’est ajouté à la normalisation de la violation de la vie privée des citoyens, également facilitée par des mesures combattre la pandémie, sans laquelle il n’y a pas de liberté qui puisse résister ».

À ce stade, João Caupers a fait référence à la soi-disant loi sur les métadonnées, qui est actuellement en cours d’examen par le parlement, après qu’en avril 2022, la Cour constitutionnelle a déclaré certaines de ses normes inconstitutionnelles.

« L’accumulation de données personnelles sur les citoyens, prétendument fondées sur leur défense, a dramatisé leur accès, une situation qui se reflète dans la polémique qui fait rage en Europe et dans ses institutions sur les soi-disant métadonnées », a-t-il souligné.

Caupers s’est également référé à une récente décision de la Cour constitutionnelle allemande, qui a déclaré inconstitutionnelle l’utilisation, par la police et les forces de sécurité, d’algorithmes prédictifs, qui permettaient « d’établir des profils d’éventuels coupables avant même que tout crime ne soit commis ».

« Nous pouvons voir qu’un avenir menaçant frappe déjà à notre porte. Mais la décision du tribunal prestigieux démontre également qu’elle peut et doit être combattue. Les juridictions constitutionnelles ainsi que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) auront, je crois, un rôle important dans la résolution de ce grave problème », a-t-il déclaré.

Caupers considère ainsi que « l’avenir des juridictions constitutionnelles apparaît complexe, problématique et exigeant ».

« Pour y faire face, ils vont devoir se réinventer. Sauront-ils faire ? Peuvent-ils le faire? Le feras tu? » interrogé.

TA/TZS // JPS

Articles récents